Deuxième source de production d’électricité en France, l’hydroélectricité est aussi une énergie locale, durable et compétitive, dont le potentiel est encore peu exploité, notamment celui de la petite hydroélectricité. La parole aux dirigeants de l’entreprise UNITe, Alexandre Albanel, président et administrateur du syndicat France Hydro Électricité et Stéphane Maureau, directeur général, qui expliquent pourquoi et comment cette filière doit être davantage exploitée.
« Les ouvrages hydroélectriques peuvent aujourd’hui être construits avec de faibles impacts environnementaux et un bon respect de la continuité écologique des cours d’eau, expliquent les dirigeants de UNITe, Alexandre Albanel, président et Stéphane Maureau, directeur général. L’hydroélectricité transforme la force de l’eau en électricité, sans la consommer : toute l’eau utilisée est restituée en aval du cours d’eau et peut être utilisée pour d’autres usages (eau potable, sports d’eau douce, irrigation, loisirs…) ou pour la production d’hydroélectricité sur d’autres sites situés plus en aval. C’est un fait, cela contribue à la stabilité de la fréquence du réseau électrique. De plus, c’est une technologique sûre et durable : bien entretenue, une centrale hydroélectrique a une longévité au-delà du siècle !
Enfin, dans le cas d’installations de type STEP (Station de transfert d’énergie par pompage), l’hydroélectricité apporte une flexibilité précieuse : il est possible de stocker de l’énergie lorsque le réseau n’en n’a pas besoin et de restituer cette énergie en turbinant l’eau stockée, lorsque le réseau en a besoin. »
Des atouts fondamentaux pour le mix énergétique français
« Il existe un très grand potentiel de sites à équiper dans le segment de la petite hydroélectricité : une étude publique réalisée par la DEGEC (Direction générale énergie et climat), la Direction Eau et Biodiversité et la DREAL (Direction régionale de l’environnement de l’aménagement et du logement) a identifié un potentiel permettant de produire près de 12 TWh supplémentaires par an. En 2012, une étude de l’Union française d’électricité aboutissait au même résultat. Aujourd’hui, la petite hydroélectricité représente environ 10 % de la production hydroélectrique nationale, soit environ 6 TWh par an (soit environ 1,2 % de la consommation nationale annuelle). Il serait donc possible de multiplier par 3 la production de petite hydroélectricité en France », poursuit le président.
Pourquoi ne le fait-on pas ?
Selon les dirigeants de UNITe : « 75 % du potentiel d’équipement est situé sur des cours d’eau « sanctuarisés » par un classement dit « en liste 1 », sur lesquels l’autorisation de construire est quasiment impossible à obtenir. Les professionnels de la petite hydroélectricité regrettent cette situation, qui semble ne pas prendre en considération le fait qu’aujourd’hui, les ouvrages hydroélectriques peuvent être construits tout en assurant une bonne continuité écologique des cours d’eau. Là où les nouveaux équipements sont envisageables la méthode et la durée d’instruction des dossiers est telles, que plus de 9 projets sur 10 sont abandonnés et celui qui aboutira à une construction, aura connu 7 à 9 ans de procédures administratives ».
Que faire pour sortir de cette situation ?
« Le développement de la petite hydroélectricité pourrait reprendre dans le cadre d’une volonté politique qui devrait résulter d’une prise en compte, juste et équilibrée, entre les impacts des ouvrages d’une part et atouts fondamentaux de la production hydroélectrique, d’autre-part, reprend le directeur général. La démarche consistant à éviter, limiter et compenser les impacts environnementaux d’un projet hydroélectrique, est malheureusement souvent évaluée d’une manière déséquilibrée, qui conduit l’administration à avoir des exigences démesurées, qui anéantissent la viabilité des projets, en oubliant de peser leurs précieux atouts.
En outre, de manière concrète, quelques décisions simples permettraient de produire rapidement plus d’électricité, sur les sites déjà équipés. La loi dite d’accélération des énergies renouvelables n’a pas fait d’avancées majeures dans ce sens. Certaines mesures pourraient néanmoins arriver dans les décrets d’application à venir. »
Des mesures simples et vertueuses
« L’objectif est de maintenir les débits non turbinés (débits réservés) au minimum légal (10 % du module de la rivière) pour préserver de façon suffisante la vie piscicole (rappelons que 100 % de l’eau pour la production d’hydroélectricité́ est restituée aux cours d’eau plus en aval). Une autre mesure est d’autoriser les augmentations de puissance des installations et donc mieux utiliser le potentiel des turbines installées. Il faut prendre en considération les conditions de construction de centrales hydroélectrique sur certaines rivières, et le très faible impact des centrales bien conçues sur la continuité écologique. Les règles de gestion des retenues d’eau, pour accroitre la flexibilité́ de pilotage des centrales hydroélectriques doivent s’assouplir, afin de mieux s’adapter aux variations de la consommation. Les dossiers administratifs de remise en service d’anciens sites doivent être débloqués. Enfin, il est impératif de donner une meilleure visibilité aux investisseurs, notamment changer le mode de calcul des compléments de rémunération dans les appels d’offre de la CRE, pour passer d’un M0 annuel à un M0 mensuel, comme pour les autres filières », soulignent encore les dirigeants.